Précurseure technologique
ABITIBI-TEMISCAMINGUE, QUEBEC. Alors qu’on regarde souvent le complexe minier de LaRonde comme le site qui a permis à Agnico Eagle de prendre son envol, la zone 5 de LaRonde est le projet qui attire aujourd’hui toute l’attention car c’est là qu’ont eu lieu deux premières en matière d’automatisation de l’exploitation minière en Amérique du Nord.
Située à 500 km au nord de Montréal, la ville de Val-d’Or, dans la région de l’Abitibi-Témiscamingue, au nord-ouest du Québec, a une histoire minière riche. Surnommée la « Vallée de l’or » au moment d’une ruée vers l’or au début du 20e siècle, Val-d’Or a connu bien des hauts et des bas depuis mais a survécu, et de nombreuses grandes compagnies minières s’y sont implantées. La plus connue d’entre elles est probablement Agnico Eagle, qui y a ouvert sa mine d’or souterraine phare, le complexe minier LaRonde, en 1988. Cette installation a largement contribué à l’essor d’un producteur d’or mondial désormais largement reconnu.
Le surintendant opérations minières Luc Girard décrit la zone 5 (LZ5) de LaRonde comme une petite zone minière à l’intérieur du vaste complexe LaRonde. « Les gens qui travaillent à LZ5 ont vraiment un intérêt marqué envers les nouvelles technologies », ajoute-t-il. Pour Agnico Eagle, cette zone est un terrain d’essai pour les nouvelles technologies susceptibles d’être mises en œuvre ultérieurement dans ses autres exploitations à travers le monde.
La mine souterraine est connectée au réseau 4G LTE (Long Term Evolution), une première dans l’industrie minière canadienne. Ce déploiement permet de simplifier les communications au sein de la mine. Des camions autonomes de 51 tonnes chargés de débris rocheux ressortent ponctuellement à l’air libre toutes les 30 minutes en l’absence, apparemment, de tout mineur sur place.
La plateforme AutoMine de Sandvik est l’une des technologies que la mine expérimente depuis 2018. En trois ans à peine, LZ5 a fait évoluer le système AutoMine qui avait été installé : d’un chargeur unique opérant dans une chambre isolée, elle est passée à trois chargeurs Sandvik LH517i et quatre camions Sandvik TH551i, qui interviennent toute la semaine pendant des périodes de travail autonomes supplémentaires et font progresser de 10 % la production de la mine. En 2021, explique Luc Girard, la flotte s’agrandira encore et comprendra quatre chargeurs Sandvik LH517i et six camions Sandvik TH551i.
« À LZ5, les opérateurs se sont familiarisés avec le système Sandvik en un mois, souligne Devin Wilson, surintendant services techniques. Ce n’est pas un système bien compliqué. Une fois qu’on sait comment ça marche, il est vraiment très facile d’emploi. »
Bien que l’apprentissage du fonctionnement du système ait été rapide, la mise en œuvre d’AutoMine à LZ5 est unique en son genre et a réservé son lot de difficultés. Ce déploiement, qui vise à faire transporter le minerai par des camions autonomes depuis le niveau de production jusqu’au lieu de stockage via une rampe de transport, est une première en Amérique du Nord. Et le système gère le trafic tout au long du processus.
L’automatisation est généralement envisagée pour les applications où les itinéraires sont répétitifs, comme au niveau du transfert des déblais par exemple, mais en ce qui concerne une exploitation par abattage par chambre vide (open stoping), la situation est tout à fait différente. À LZ5, il n’y a pas de zone automatisée en tant que telle : celle-ci peut changer du jour au lendemain.
« C’est vraiment un processus dynamique pour nous, poursuit Devin Wilson. Avant, AutoMine et l’automatisation servaient surtout à déplacer les déblais miniers d’un point A vers un point B. Ce que nous avons fait à LZ5, c’est de tenter de rendre le processus plus dynamique, c’est-à-dire qu’un jour, on peut être à un endroit, et le lendemain à un autre. »
Marc Saint-Pierre, spécialiste en automatisation, vérifie chaque jour le plan de production et programme les nouveaux itinéraires que devront emprunter les camions et les chargeurs. « Les camions vont là où on leur dit d’aller. Ils vont remonter à la surface dans une mission, puis on va leur demander une autre mission à d’autres niveaux. »
Devin Wilson explique que le réseau LTE de la mine a joué un rôle essentiel pour faciliter le changement constant d’itinéraire de la flotte AutoMine : « Quoi qu’il arrive, la communication est assurée par le LTE et c’est ce qui nous a permis de mettre en œuvre l’automatisation dans toute la mine. »
En plus d’utiliser le système AutoMine dans ce contexte dynamique, LZ5 avait prévu d’automatiser un cycle complet de marinage, de la chambre excavée jusqu’au lieu de stockage en surface, ce qui impliquait un transport autonome par camion via la rampe – une deuxième première en Amérique du Nord sur le même site.
Les équipements sont commandés par des opérateurs pendant les quarts de jour et de nuit. Mais entre les changements d’équipe et au cours des fins de semaine, l’ensemble du cycle de marinage est piloté depuis la salle de commande à la surface. Un Sandvik LH517i démarre à un point de soutirage où l’opérateur AutoMine télécommande le remplissage d’un godet dans la chambre. Ensuite, le chargeur se dirige tout seul vers un lieu de chargement et relève automatiquement son godet à l’approche d’un tombereau Sandvik TH551i. Puis un opérateur télécommande le versement du godet dans le camion. Une fois le camion chargé, un opérateur AutoMine l’envoie vers la surface via la rampe de transport.
La gestion automatisée du trafic permet à plusieurs véhicules connectés à AutoMine d’emprunter la rampe en même temps, de donner la priorité aux camions chargés par rapport aux camions vides et de gérer les déplacements des véhicules en toute sécurité.
Devin Wilson indique qu’il existe tout au long de la rampe des refuges où un camion vide peut se garer afin de laisser passer un camion chargé : « Sandvik a fait du bon travail en mettant en place une logique efficace de circulation. Tout se fait tout seul, le déplacement des véhicules est fluide. Tout ce qu’on a à faire, c’est envoyer les véhicules d’un point A vers un point B, et le logiciel Traffic Logic s’occupe du reste. »
L’automatisation du cycle de marinage a permis à LZ5 de gagner 48 heures de production supplémentaires par semaine, car la mine peut désormais travailler en mode autonome pendant deux quarts de nuit les fins de semaine et entre deux changements d’équipes par jour.
« Le plus important avec l’automatisation à LZ5, c’est qu’on a pu tirer parti de ces temps d’arrêt pendant lesquels on ne pouvait pas évacuer les déblais miniers avant. Maintenant, on peut les exploiter. »
En général, poursuit Devin Wilson, les opérateurs d’AutoMine peuvent faire exécuter quatre allers-retours à un camion Sandvik TH551i pendant un changement d’équipe et 40 trajets pendant un quart de nuit en fin de semaine, ce qui représente une moyenne de 136 voyages supplémentaires par semaine. « Avec AutoMine, nos chiffres montrent qu’on a augmenté de 10 % notre capacité de tonnage par jour », souligne Luc Girard.
En 2020, le tonnage chargé et transporté en mode autonome pendant les périodes improductives était de 12 %, et les objectifs pour 2021 sont encore plus ambitieux. « Notre objectif en 2021 est de 17 %, mais lorsque les planètes s’alignent, qu’on a des chambres bien situées et que le système fonctionne bien, on peut déplacer jusqu’à 20 ou 25 % de nos déblais grâce à l’automatisation, indique Devin Wilson. Certains gains de productivité ont réellement dépassé ce qu’on avait prévu au départ. Sans l’automatisation, on n’aurait pas pu faire passer notre tonnage de 2 000 tonnes par jour il y a quelques années à 3 000 tonnes par jour aujourd’hui. »
Les gains constatés par la mine dépassent la seule augmentation du tonnage quotidien. « En ayant recours à AutoMine pour dégager les rampes de développement ou pour transporter le minerai hors du site, on éloigne les mineurs de ces zones potentiellement plus dangereuses.»
Agnico Eagle
Agnico Eagle est une compagnie minière et un producteur d’or de premier plan qui extrait des métaux précieux depuis 1957. Les mines qu’elle exploite actuellement sont situées au Canada, en Finlande et au Mexique. Des activités de prospection et d’aménagement sont en cours dans chacun de ces pays ainsi qu’aux États-Unis, en Suède et en Colombie.
Selon Devin Wilson, l’une des principales difficultés rencontrées par la mine a été d’ordre culturel. Il explique que la meilleure façon d’aider les opérateurs à passer ce cap était de leur montrer dans quelle mesure AutoMine pouvait améliorer les performances en matière de santé et de sécurité.
« Une fois qu’ils constatent l’efficacité du système, ils s’y rallient rapidement. Certains opérateurs nous ont dit que cela allait prolonger leur carrière en leur permettant de travailler depuis la surface. On n’aurait jamais pu arriver là où on en est aujourd’hui si on n’y avait pas cru, si on n’avait pas eu le soutien de tout le monde, de la direction aux mineurs sous terre. »
Luc Girard et Devin Wilson conviennent que la collaboration entre LZ5 et Sandvik a été cruciale pour la réussite du projet.
« Quand on fait affaire avec un fournisseur d’équipements ou de services, ce qu’on cherche en premier, c’est la collaboration de ce fournisseur-là, puis ensuite, c’est service, service, service », insiste Luc Girard.
Son collègue acquiesce : « Sandvik a toujours répondu présent pour nous accompagner et trouver une solution au problème qui se pose, et c’est pour cette raison qu’on en est arrivé là où nous en sommes avec l’automatisation. »
La mine prévoit de continuer à repousser les limites des capacités d’AutoMine en introduisant de nouvelles technologies et montrant la voie à d’autres sites.
« Compte tenu de la situation et de nos besoins, Sandvik est un excellent choix pour l’automatisation, conclut Devin Wilson. Cela fait 10, 15 ou 20 ans qu’on rêve de cette technologie, mais pour la première fois, je pense qu’on peut dire qu’elle est là, qu’elle est prête, qu’elle est arrivée à maturité. »
LaRonde Zone 5
LaRonde Zone 5 (LZ5) est située immédiatement à l’ouest du célèbre complexe minier LaRonde d’Agnico Eagle. LZ5 a atteint le stade de la production commerciale en tant qu’exploitation souterraine en juin 2018. Le minerai est traité dans les installations du complexe LaRonde. Au 31 décembre 2020, elle disposait de réserves minérales prouvées et probables de 788 000 onces d’or (11,8 millions de tonnes d’une teneur de 2,08 g d’or par tonne), et elle devrait maintenir un taux de production d’environ 3 000 tonnes par jour jusqu’en 2029.